Il y a peut-être autant de vérités parmi les hommes que d’erreurs, autant de bonnes qualités que de mauvaises, autant de plaisirs que de peines ; mais nous aimons à contrôler la nature humaine, pour essayer de nous élever au-dessus de notre espèce, et pour nous enrichir de la considération dont nous tâchons de la dépouiller. Nous sommes si présomptueux, que nous croyons pouvoir séparer notre intérêt personnel de celui de l’humanité, et médire du genre humain, sans nous compromettre. Cette vanité ridicule a rempli les livres des philosophes d’invectives contre la nature. L’homme est maintenant en disgrâce chez tous ceux qui pensent, et c’est à qui le chargera de plus de vices ; mais peut-être est-il sur le point de se relever, et de se faire restituer toutes ses vertus ; car rien n’est stable, et la philosophie a ses modes comme les habits, la musique, l’architecture, etc.
Il n’y a guère d’esprits qui soient capables d’embrasser à la fois toutes les faces de chaque sujet, et c’est là, à ce qu’il me semble, la source la plus ordinaire des erreurs des hommes.
L’obscurité est le royaume de l’erreur.
Je ne crois nullement que le dernier mot de la sagesse soit de s’abandonner à la nature, et de laisser libre cours aux instincts : mais je crois qu’avant de chercher à les réduire et domestiquer, il importe de les bien comprendre – car nombre des disharmonies dont nous avons à souffrir ne sont qu’apparentes et dues uniquement à des erreurs d’interprétation.
La clarté et la distinction ne constituent pas des critères de la vérité, mais des traits tels que l'obscurité ou la confusion sont susceptibles d'être des indices d'erreur.
Je me trouvais embarrassé de tant de doutes et d'erreurs, qu'il me semblait n'avoir fait autre profit, en tâchant de m'instruire, sinon que j'avais découvert de plus en plus mon ignorance.
Il n’y aurait point d’erreurs qui ne périssent d’elles-mêmes, rendues clairement.
Tout ce qui distingue les hommes paraît peu de chose. Qu’est-ce qui fait la beauté ou la laideur, la santé ou l’infirmité, l’esprit ou la stupidité ? une légère différence des organes, un peu plus ou un peu moins de bile, etc. Cependant, ce plus ou ce moins est d’une importance infinie pour les hommes ; et, lorsqu’ils en jugent autrement, ils sont dans l’erreur.
Mais ce qu'il y a de particulièrement néfaste à imposer silence à l'expression d'une opinion, c'est que cela revient à voler l'humanité : tant la postérité que la génération présente, les détracteurs de cette opinion davantage encore que ses détenteurs. Si l'opinion est juste, on les prive de l'occasion d'échanger l'erreur pour la vérité ; si elle est fausse, ils perdent un bénéfice presque aussi considérable : une perception plus claire et une impression plus vive de la vérité que produit sa confrontation avec l'erreur.
Désordre dans le corps, erreur dans l’esprit, l’un nourrissant l’autre.
C'est une erreur de croire nécessairement faux ce qu'on ne comprend pas.
Ce qui n’était qu’une erreur devient une faute si l’on y retombe une seconde foi.
Il n'est pas sage d'être trop sûr de notre sagesse. Il est bon de se faire rappeler que le plus fort peut s'affaiblir et que le plus sage peut se tromper.
L'intelligence n’est pas de ne pas faire d’erreur, mais de voir au plus vite comment les corriger.
L'erreur ne devient pas vérité parce qu'elle se propage et se multiplie; la vérité ne devient pas erreur parce que nul ne la voit.
Plaisante justice, qu'une rivière borne ! Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà.